Faut-il être passionné pour réussir dans le dev ?

By Hugo LassiègeApr 30, 20228 min read

Faut-il être passionné et vivre de code d'eau fraîche pour réussir dans le milieu du dev ? 

Est-ce qu'on peut stopper le boulot à 18h, faire du sport, regarder des séries, vivre une vie sociale et faire une carrière dans l'informatique ?

J'ai vu cette question passer sur Twitter et je me suis dit qu'il serait difficile de répondre et de mettre toutes les nuances nécessaires en 280 caractères. 

Alors je vais profiter de ce blog pour répondre. 

https://twitter.com/MarcyChama/status/1520373816337313792

TLDR;

Evidemment qu’on peut.

Voilà, c’est tout, vous pouvez retourner à une activité normale :)

Mais si vous voulez plus de nuances, c’est maintenant.

La question est difficile, car je sais qu'elle cache plusieurs sous-sujets :

- la culture geek

Il existe un stéréotype de l'informaticien geek qui a commencé à coder sur MO5 qui codait au collège et lycée en Basic et enchaîne les sides projects. Et ces personnes seraient les seuls destinés aux carrières longues dans l'IT. En plus cette imagerie s'accompagne parfois d'un cliché sur le bro masculin puisque, en théorie, seuls les mecs geekaient dans leurs jeunesses. Bref, tous les autres, dont les femmes, seraient destinés à se lasser du dev, au mieux finir chef de projet, au pire sortir complètement de ce milieu. 

- le burnout

Si l'informatique nécessite de manger code, vivre code, boire code, alors l'équilibre pro perso est forcément brisé et ne peut que conduire au burnout.

Corollaire, tous ceux qui ont réussi font, ont fait ou feront un burnout. 

- la définition de la réussite

En fait, c'est quoi la réussite ? Parce que, si on ne définit pas ce terme, chacun va garder sa définition dans un coin de tête et donc répondre à la question d'origine en fonction de ce biais.

Tout le monde n'aura pas les mêmes critères de réussite. Déjà est ce qu'on parle uniquement de réussite professionnelle ou de réussite au sens large, de sa vie ?

La culture “geek” 

Bon cela étant dit, si la formulation est caricaturale "manger dormir et vivre code", il y a des personnes qui vont effectivement plus s'investir dans leur travail.

Et selon la façon dont ils vont le faire, pour certains ça aura des conséquences positives sur leur réussite professionnelle, selon leurs critères. 

Et pour certains ils vont s'investir beaucoup mais sans que ce soit efficace.

Vous avez noté l’usage de “selon”, “pour certains” pour dénoter du caractère spécifique et conditionnel ?

Dans tous les cas, ce n'est pas réservé à une élite. Clairement, il faut casser ce stéréotype du geek informaticien. Parce qu’il finit par être toxique en imposant un cliché de comment on devrait être pour réussir.

  • De nombreux professionnels n'ont pas commencé leur carrière à coder des shareware à 12 ans. 
  • De nombreux professionnels sont silencieux sur Twitter, ne bloggent pas, ne sont pas orateurs dans les conférences.
  • De nombreux professionnels stoppent leur journée de travail à 18h et passent à autre chose. 
  • De nombreux professionnels n’ont pas de side projects à montrer sur Github.

Et ce n'est pas grave. J’ai connu et je connais encore des gens très bons dans leurs métiers qui ne cochent aucune des cases ci-dessus.  

Le burnout

Ce qui est sûr c'est qu'au-delà de la passion et de l'investissement en temps, aimer son travail permet d'être plus efficace et de durer plus longtemps.

Venir travailler à reculons, quelque soit le métier, et quand on a le choix bien sûr, c'est la garantie soit de changer de métier soit de ne pas s'investir très fort dans la réussite de sa carrière pro, quelque soit la définition qu'on lui donne.

Ah oui et c’est aussi un fort risque de tomber en burnout, ou en bore out. La soupape qui explose, c’est pas nécessairement une question de volume de travail.

Bon donc pour éviter cela, dans l’idéal il faudrait aimer son travail ? A minima, ne pas le détester. 

Alors, non, ce n'est pas l’unique sujet. Il y a eu de très bonnes présentations dans des conférences ces dernières années, faites par des personnes qui aiment leur travail et qui ont fait des burnout.

Pour autant, il ne faut pas voir ces conférences comme étant révélatrices que toutes les personnes passionnés finissent par exploser en vol. 

C’est parce qu’elles avaient déjà une certaine aura qu’on les voit en conférence. Donc c’est déjà un biais de penser que : investissement fort == passion == présentation en conférence == burnout

On peut être en burnout (ou bore out) sur un métier qui ne nous passionne pas et sans être connu pour ça ^^

J’ai pas de recettes pour éviter les épisodes difficiles, liés au travail ou non. Tout du moins, j’ai pas de bons conseils puisque j’en ai connu plusieurs, de durée variées, d’origines diverses. Il y a un équilibre délicat permanent à trouver sur la gestion de son temps, les attentes qu’on peut avoir et les attentes de nos proches. 

Mais ce n’est pas lié à l’IT en particulier et le fait de devoir absolument être passionné pour réussir. Ce n’est pas irrémédiable de faire un burnout. Et ce n’est certainement pas un trophée.

Vous y aurez peut-être droit dans votre vie pour de multiples raisons et pas forcément lié au fait de vous investir dans votre travail. 

Le burnout est aussi lié aux espérances qu’on se fixe. Et ça nous mène au point suivant. 

La définition de la réussite

Un des facteurs importants c’est la définition qu’on peut avoir de la réussite.

Déjà on va écarter un sujet délicat. On est privilégié dans l’IT. Le métier n’est pas pénible physiquement, il est relativement bien payé et la demande sur le marché est assez dynamique pour trouver chaussure à son pied.

Maintenant c’est pas parce qu’on est privilégié qu’on est tous épanoui. On aura tous des leviers de motivation différents. Pour certains ce sera la reconnaissance de ces pairs, le défi intellectuel de résoudre des challenges complexes, l'argent gagné, la mission de sa société etc... Et ces motivations vont même varier tout au long de la vie. 

Et si notre motivation ne repose pas sur la réussite de sa carrière pro ?

Eh bien c’est pas grave !

Avoir une vie de famille épanouie, une vie sociale remplie, une carrière sportive, contribuer à une association qui nous semble avoir du sens, c’est également un super objectif. Ne vous laissez pas dire le contraire. On choisit un métier, on essaie de s'y plaire au max pour pas non plus passer un mauvais moment et ensuite on positionne un curseur entre ce métier et le reste. Et c’est très bien.

D’ailleurs, doit-on juger de la réussite de la carrière par l’argent gagné ?

Non. Le sens de votre métier peut être plus important. Et malheureusement le sens n’est pas toujours relié à la rémunération. 

La réussite en tant que dev

Maintenant que j’ai posé et évacué tous ces points, j’ai les nuances nécessaires pour répondre à une partie de la question. 

On peut bien gagner sa vie dans ce métier par nature car le secteur est demandeur et on peut avoir une vie sociale/familiale épanouie, avoir un bon équilibre pro/perso etc... Mais, pour gagner TRES bien sa vie, il y aura une énergie plus importante à mettre.

Si votre définition de la réussite c’est la reconnaissance de vos pairs dans l’industrie, c’est gagner significativement plus que les autres, des articles de vous dans la presse, c'est de rentrer dans une big tech ou une scaleup ou que sais-je encore. Alors ce serait hypocrite de dire que l'intérêt qu'on porte à son métier et l'investissement personnel ne font pas partie des leviers qui permettent de réussir. Ce ne sont pas les seuls leviers, ce n'est parfois pas suffisant. Mais ils en font partie c'est vrai. 

Ça peut nécessiter de faire plus d’heures pour creuser des sujets en particulier, de s’intéresser plus en profondeur que les autres aux bons problèmes (oui, ils ne se valent pas tous). 

La bonne nouvelle c’est pas que c’est pas réservé à un type de personnes, c’est que parfois la chance ou le fait de savoir saisir une opportunité joue aussi beaucoup, que parfois il peut s’agir d’un investissement temporaire sur lequel on peut capitaliser ensuite. 

Mais j’aimerais aussi éviter le cliché de : tout est possible facilement, on peut devenir Mark Zuckerberg en travaillant peu, avoir une vie sociale épanouie, gagner sur tous les tableaux, perso comme pros et sur fond de musique de Mary Poppins.

Et ce n'est pas grave en fait. Vraiment. Il faut jouer les cartes qu’on a envie de jouer, pas celles que les autres nous disent de jouer. A la fin ce qui compte, c’est ce qu’on a fait, pas ce qu’on aurait pu faire. Pas ce qu'on pense que les autres attendaient qu’on fasse. Si vous avez envie de vous investir fortement, faites le et on ne doit pas vous juger pour ça (ça existe aussi). Si vous souhaitez placer le curseur différemment, faites le.

Bon là je m’emballe, c’est un peut-être un billet un peu différent de ce que j’ai l’habitude d’écrire.

Et sur ce, pas de pression ;)

Annexe:

Faut-il être passionné pour être un développeur - JeSuisUnDev (manifestement je suis pas très original, ce thème a déjà été abordé ^^)


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Written by Hugo Lassiège

Ingénieur logiciel avec plus de 20 ans d'expérience. J'aime partager sur les technologies et les startups

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